Qu’est-ce que la cornée ?
La greffe de cornée est l’une des interventions chirurgicales les plus courantes et les plus efficaces en ophtalmologie. Chaque année, des milliers de personnes dans le monde recouvrent partiellement ou totalement la vue grâce à cette opération. Mais en quoi consiste exactement cette greffe ? Qui peut en bénéficier ? Et quels sont les défis associés à cette procédure ? Cet article vous propose une exploration complète de la greffe de cornée, de ses techniques aux enjeux médicaux et éthiques qu’elle soulève.

La cornée est la membrane transparente qui recouvre le devant de l’œil. Elle joue un rôle essentiel dans la vision, en permettant la transmission et la focalisation de la lumière vers la rétine. Contrairement à d’autres tissus du corps, elle est avasculaire (sans vaisseaux sanguins), ce qui en fait un tissu relativement « privilégié » sur le plan immunologique — un avantage important pour la transplantation.
La cornée est composée de plusieurs couches : l’épithélium (couche externe), le stroma (couche intermédiaire) et l’endothélium (couche interne). Chacune de ces couches peut être affectée par différentes pathologies, et selon le type d’atteinte, le type de greffe varie.
Quand faut-il une greffe de cornée ?
La greffe de cornée est envisagée lorsque la cornée est trop endommagée ou déformée pour remplir sa fonction correctement. Les principales indications incluent :
- Kératocône : une déformation progressive de la cornée en forme de cône.
- Dystrophies cornéennes : maladies héréditaires affectant la transparence cornéenne.
- Cicatrices cornéennes : suite à des infections (herpès, kératites) ou traumatismes.
- Oedème cornéen : causé par une perte des cellules endothéliales, souvent après une chirurgie de la cataracte.
- Rejet d’une précédente greffe : dans certains cas, une seconde greffe est nécessaire.
Les différentes techniques de greffe
Il existe plusieurs types de greffes de cornée, en fonction de la partie de la cornée à remplacer :
1. Greffe pénétrante (PK – Penetrating Keratoplasty)
C’est la méthode classique qui consiste à remplacer toute l’épaisseur de la cornée par une cornée saine provenant d’un donneur. Elle est utilisée quand toutes les couches de la cornée sont atteintes. La récupération est plus longue, et les risques de rejet plus importants.
2. Greffes lamellaires (partielles)
Ces greffes ne remplacent que les couches atteintes :
- DALK (Deep Anterior Lamellar Keratoplasty) : ne remplace que les couches avant (épithélium et stroma). Elle est indiquée pour les patients atteints de kératocône.
- DSAEK / DMEK (Descemet’s Stripping Automated Endothelial Keratoplasty / Descemet Membrane Endothelial Keratoplasty) : remplace uniquement l’endothélium, la couche la plus interne, idéale en cas de dystrophie endothéliale. DMEK est la plus fine et la plus récente, offrant des résultats visuels excellents et une récupération rapide.
Le déroulement de l’intervention
La greffe de cornée se fait en milieu chirurgical, généralement sous anesthésie locale, parfois générale. L’intervention dure entre 30 minutes et 1h30 selon la technique utilisée.
Le chirurgien retire la partie malade de la cornée et la remplace par un greffon sain, fixé à l’aide de sutures ou d’un système de pression intra-oculaire (air ou gaz). Le greffon provient généralement d’un donneur décédé, dont la cornée a été prélevée dans un délai de 12 à 24 heures après le décès.
Après l’opération, un traitement à base de collyres antibiotiques et anti-inflammatoires est prescrit, parfois accompagné de traitements immunosuppresseurs locaux.
Récupération et résultats
La récupération visuelle varie selon le type de greffe. Pour les greffes pénétrantes, il faut souvent plusieurs mois, voire un an, pour obtenir une vision stable. Les greffes lamellaires, en revanche, permettent une récupération plus rapide, parfois en quelques semaines.
Dans la majorité des cas, la vision s’améliore de manière significative, même si elle n’atteint pas toujours la perfection. Des lunettes ou des lentilles spéciales peuvent être nécessaires.
Risques et complications
Comme toute intervention chirurgicale, la greffe de cornée comporte des risques :
- Rejet du greffon : bien que relativement rare (environ 10 % des cas), il reste le principal risque. Il se manifeste par une baisse de vision, une rougeur, ou une douleur oculaire.
- Infection : une bonne hygiène et un suivi médical rigoureux réduisent ce risque.
- Augmentation de la pression intraoculaire (glaucome secondaire).
- Défaut de cicatrisation ou mauvaise adhérence du greffon.
Heureusement, avec un suivi adéquat et une détection précoce des complications, la plupart des greffes sont des réussites.
Le don de cornée : un geste vital
La greffe de cornée ne serait pas possible sans la générosité des donneurs. Contrairement à d’autres organes, la cornée peut être prélevée même si la personne décédée souffrait de certaines maladies, car elle est moins sensible au rejet. Une seule personne peut redonner la vue à deux patients.
Dans de nombreux pays, le manque de donneurs reste un frein majeur. Sensibiliser la population au don d’organes et de tissus est donc essentiel.
Les avancées futures
La recherche dans le domaine des greffes cornéennes est en plein essor. On assiste à l’émergence de solutions innovantes :
- Cornées artificielles (kératoprothèses) : en cas de rejet ou de contre-indication à la greffe classique.
- Ingénierie tissulaire : fabrication de cornées en laboratoire à partir de cellules souches.
- Techniques chirurgicales assistées par laser ou robotique : pour améliorer la précision et réduire les risques.
Ces innovations promettent d’élargir les possibilités de traitement, notamment dans les régions où l’accès aux greffons reste limité.